Message pascal des carmélites

pour temps de confinement

Le carême a pris fin….mais la quarantaine se poursuit. Cette année, le temps du désert et du manque peuvent sembler à un certain nombre plus interminables que jamais. Tant d’hommes et de femmes sont encore pris dans la tempête : quand nombre de repères et d’habitudes se trouvent bouleversés, quand la crainte de la maladie et l’incertitude du lendemain demeurent, il y a bien de quoi se sentir un peu perdu. Une sourde usure éprouve et creuse en beaucoup toutes sortes de détresses, de manques….mais nous le savons, cette période génère aussi des solidarités nouvelles. A l’heure où tous tentent de s’adapter à cette situation inédite, où des formes nouvelles de présence aux uns et aux autres se cherchent, nous faisons peut-être l’expérience que finalement, vraiment, vitalement, des êtres de chair et d’os nous manquent.  A l’heure des messes par écrans interposés, des fidèles sans prêtres et des prêtres sans fidèles, des corps nous manquent : celui du Christ en son Eucharistie, celui du Christ en son Eglise, celui de nos frères – y compris ceux qui le sont déjà de cœur, tous les catéchumènes, dont le baptême a été ajourné.

Au matin de Pâques aussi un corps manquait. Il manquait aux yeux des disciples penchés sur le tombeau vide, il manquait à Marie Madeleine éplorée, il manquait aux yeux des disciples d’Emmaüs… Jésus nous manque. Au cœur de l’Eglise, la vie religieuse ne se comprend qu’en fonction de ce manque ; par sa façon de vivre elle est tendue vers l’attente du retour du Seigneur, et elle a, par vocation, à en être le témoin permanent. Non pas en étant repliée sur elle-même en ce manque, non pas en se morfondant et en se lamentant plus fort que tous sur ce qui n’est plus, mais en gardant au contraire le cœur et les yeux grands ouverts sur le monde. Des yeux de Pâques brillants de la lumière du cierge pascal qui vient déchirer la nuit lors de la vigile. Un cœur pris d’une émotion  profonde lorsque retentit l’exultation de l’annonce de la Résurrection du Seigneur. Car depuis que le Christ est ressuscité, nous le savons, nous le croyons, la force de Dieu oriente « vers le bien tout ce qui nous arrive, même les choses tristes »… avec Lui, « la vie ne meurt jamais.»  (cf pape François, le 27/03/2020).

De la fenêtre de leurs cellules certaines sœurs aperçoivent les tours du Centre Hospitalier de Valenciennes et au jour tombant nous entendons l’acclamation qui monte de la ville pour tous les héros proches et lointains qui sont au front ; notre prière silencieuse les rejoint. A l’heure de la résurrection, osons aussi faire retentir dans nos cités l’acclamation de la Bonne Nouvelle : Ô ma joie, le Christ est ressuscité ! C’est bien à nous d’en être les témoins. Un monde nouveau est en train de naître, ne le voyez vous pas ?...Gardons ouverts sur le monde des yeux de Pâques.

Joyeuse fête à chacun ! Alleluia !

Les carmélites de Saint-Saulve

Article publié par Vie Religieuse • Publié le Lundi 13 avril 2020 • 2985 visites

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